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alaoui.abdelouahed
23 novembre 2007

LA PENSEE POLITIQUE DE JOHN LOCKE

LA PENSEE POLITIQUE DE JOHN LOCKE

   

Cours en accès libre d'histoire des idées politiques



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JOHN LOCKE est né le 29 août 1632 à Wrington, près de Bristol, dans une famille aisée du Somerset. Il est le fils aîné d'un conseiller juridique auprès des magistrats locaux. Sa jeunesse se déroule sur fond de révolution. La première révolution anglaise débute le 4 janvier 1642 avec le soulèvement de Londres et prend fin le 9 février 1649 avec la décapitation de Charles Ier Stuart. Aussi, arrivé à Oxford en 1652, les études de Locke coïncident-elles avec la période de la République. Durant l'hiver 1665-1666, Locke part en Brandebourg comme secrétaire d'ambassade de sir Walter Varre. De retour en Angleterre, il refuse un autre poste de secrétaire et s'installe à Oxford, où il a l'occasion de soigner lord Ashley (1621-1683), à cette époque chancelier de l'Echiquier, dont il devient le médecin particulier. La même année il compose un Essai sur la tolérance. En 1688, il est élu membre de la Royal Society, et publie un traité médical, l'Anatomica, suivi l'année d'après par un autre traité, De Arte Medica. A partir de l'élévation de lord Ashley à la pairie (1672), Locke fera office désormais de secrétaire attitré, subissant les contrecoups de la carrière politique de celui qui était devenu le premier comte de Shaftesbury. Charles II ayant mis fin aux fonctions de son chancelier en 1673, Locke obtint de Shaftesbury l'autorisation de se rendre en France, où il vint en 1675 et demeurera jusqu'en 1679, séjournant d'abord à Montpellier, puis par alternance à Paris. A cette date, il rentre à Londres où, sous la pression de l'opinion, Charles II avait dû restituer à Shaftesbury la charge de Chancelier. Lorsque après de multiples péripéties Shaftesbury quitte l'Angleterre pour les Pays-Bas, Locke, craignant d'être arrêté, s'y réfugie aussi (7 septembre 1783). Son exil coïncide avec la seconde révolution d'Angleterre. Il ne regagne pas l'Angleterre en novembre1688 avec Guillaume d'Orange (1650-1702), mais en février 1689 avec la princesse Mary (1662-1694), l'un et l'autre étant couronnés sous les noms de Guillaume III et de Marie II Stuart. Déclinant le poste d'ambassadeur auprès de Frédéric II, électeur de Brandebourg, Locke fera fonction de Commissaire des Appels en mai 1689, puis de Commissaire au Commerce et aux Colonies. C'est dans cette dernière période qu'il s'occupe de la publication d'une partie de ses œuvres conçues antérieurement. Ainsi, en mars 1689, paraissent, en latin, ses Lettres sur la Tolérance, puis sa traduction en anglais; en 1690 c’est le Traité du Gouvernement civil. Locke s'éteint le 28 octobre 1704 dans l'Essex à Oates dans la demeure de Lady Masham, fille du philosophe Ralph Cudworth.

Partie 1 : L'état de nature : "l’homme est naturellement bon"

Selon Locke, les hommes sont, par nature, libres et égaux (Hobbes est d’accord), et ils sont gouvernés par une loi naturelle qui est celle de la raison : les hommes sont donc par nature raisonnables, libres et égaux. L'usage de la raison permet et impose à chacun de se conserver en vie par ses propres moyens tout en veillant à ne pas "envahir" le droit des autres.

L’état de nature est présenté comme une période heureuse de communisme primitif. Mais contrairement à Hobbes, Locke croit que l’homme est bon par nature (avec certains inconvénients, comme son goût pour la vengeance), les hommes à l’état naturel sont relativement pacifiques, car ils sont raisonnables et sociables. Cet état de nature n’est pas régi par la loi de la jungle, comme le pense Hobbes. L’homme a une totale liberté de disposer de lui-même et de ses biens : chacun est maître et propriétaire de sa propre personne et de son travail, chacun est seigneur absolu de sa personne et de ses possessions. En raison de l’égalité entre les hommes, un droit de nature minimum impose à chacun le respect des autres dans leur personne et dans leurs biens. Pour Locke, c’est l’absence d’un arbitre entre les hommes et non l’exercice de la violence qui caractérise l’état de nature.

L'homme naturel est un propriétaire avant la lettre, entouré de sa famille, travailleur et honnête. Pourquoi abandonne-t-il cet état si heureux pour passer contrat avec d'autres et former une société? Il échange, et pour cela il crée, au sein même de l'état de nature, les deux instruments de l'échange que sont la monnaie et la capitalisation des marchandises. Par suite des hasards des récoltes successives ou par effet de la paresse et du mauvais vouloir de certains, les propriétés se modifient. Certaines croissent, d'autres s'amenuisent ou disparaissent. Naturellement égaux devant le droit, les hommes deviennent insensiblement inégaux devant la fortune. Locke se fait le théoricien d'une accumulation primitive du capital qui crée deux classes inégales, celle des propriétaires et celle des producteurs privés de moyens de production, voués à vendre ce qui leur reste, leur force productive. Cette inégalité engendre un danger, celui de la guerre entre les hommes. Il faut donc réactiver par les lois et la menace du châtiment l'égalité naturelle, protéger par une "société d'assurance mutuelle" la grande majorité des individus contre ceux qui les contestent. Ainsi naît la société politique, fondée sur le contrat librement consenti et tacitement accepté par ceux-là même qui ne l'auraient point voulu.

Pour Locke, comme pour Hobbes, l’origine du gouvernement et de la société civile réside dans la nécessité de sortir de l’incessant conflit qui naît de la loi de nature elle-même, c’est-à-dire du droit de chacun à faire ce qui lui semble convenable pour assurer sa conservation. L’origine de la société civile ou du gouvernement civil résulte de la volonté des hommes de sauvegarder leurs droits naturels à la vie, à la liberté et à la possession légitime des biens, ce que Locke appelle "propriété". Ainsi, pour régler les différends communs qui naissent du pouvoir de l’homme de faire tour ce qui est nécessaire pour sa préservation et de la liberté où chacun est d’être juge de sa propre cause, les hommes, par un contrat social, consentent librement à ce que le gouvernement fasse les lois et l’autorise à les exécuter en vue du bien public.

Partie 2 : Théorie du contrat social : vers la société politique

Pour survivre et assurer la sauvegarde de ses biens matériels, les individus par un consentement mutuel décident de s’organiser en un seul corps politique dans lequel le plus grand nombre a le droit de conclure et d’agir. La société politique qui se constitue a pour objet de préserver la liberté et de conserver la propriété. Les individus doivent abandonner leur pouvoir naturel (leur droit exécutif naturel : chacun peut punir, réparer et prévenir), et confier à la communauté leur droit d’arbitrer, sans pour autant abandonner leurs droits naturels : liberté et propriété (comme le souhaite Hobbes). Au fond, la société politique se résume dans l’existence d’un système juridique auquel tous les membres de la société peuvent désormais recourir pour régler leurs litiges et punir les délinquants.

Partie 3 : La théorie du Gouvernement civil

La distinction des pouvoirs : l’organisation du pouvoir politique.

Le gouvernement civil doit veiller à la paix, à la sécurité et à l’harmonie. Locke invente la distinction des pouvoirs :

· le pouvoir législatif est le pouvoir suprême de la république, il est sacré, c’est le pouvoir de faire les lois. Par le pacte social, il se doit de respecter et protéger les droits naturels, car il est l’expression de la volonté du peuple. D’aucune façon, ce pouvoir ne peut être transmis à un autre corps politique ni être aliéné ; il émane du Peuple ;

· le pouvoir exécutif, ou le pouvoir de faire exécuter les lois, est confié au prince. Il est subordonné au pouvoir législatif, mais pas subalterne. Toutefois, lorsque des problèmes se présentent dans des circonstances imprévues et indéterminées, celui-ci peut agir à discrétion pour le bien public ;

· le pouvoir fédératif se rapporte aux relations entre, d'une part, une république et, d’autre part, les individus et les États ne faisant pas partie de celle-ci. Il a pour objet de déclarer la guerre, de former des alliances, de faire des traités etc... Bref, il concerne les relations avec l’extérieur.

Locke explique deux raisons pour justifier la séparation des pouvoirs : l’exécutif est toujours actif, le législatif ne l’est pas ; il faut limiter la tentation naturelle d’abuser le pouvoir.

Locke n’introduit pas un pouvoir judiciaire, comme le fera Montesquieu, car pour Locke, c’est le peuple qui devrait trancher en cas de conflit entre les pouvoirs. Selon Locke, le peuple doit nommer les magistrats de son choix pour faire les lois.

Le peuple n’exerce donc pas le pouvoir directement, mais ce sont ses représentants qui légifèrent à sa place et qui veillent au respect des droits. Chaque individu accepte alors l’application de la règle de la majorité qui veut qu’une décision majoritaire des gouvernants soit considérée comme celle de l’ensemble des gouvernés.

L’exercice du pouvoir politique : la défense du système représentatif et anti-absolutisme

Le pouvoir est seulement un dépôt et non un contrat de soumission. Il n'est nullement question de se soumettre complètement à un pouvoir absolu, comme le souhaite Hobbes. Il s’agit d’un consentement du peuple. Le droit naturel se marie ici avec la Constitution anglaise.

L’idée développée est la nécessaire subordination de l’activité des gouvernants au consentement populaire. "Le peuple est le juge suprême de la façon dont les gouvernants remplissent leur mission puisqu’il est " la personne qui leur a donné le pouvoir et qui garde à ce titre, la faculté de les révoquer ". Le contrat est spécifique : " Bien qu’ils soient liés entre eux par une relation contractuelle, les membres du peuple n’ont pas d’obligation contractuelle envers le gouvernement, et les gouvernants bénéficient du gouvernement seulement comme membre du corps politique ". Ils ne sont donc que des représentants, des députés du peuple. Ainsi, le peuple détient la souveraineté, car il est l’auteur véritable des lois. De plus, ce consentement est un acte de confiance au pouvoir politique, ce qui implique que le gouvernement est responsable devant le peuple et soumis à son autorité.

Le peuple est délivré de son consentement et l’autorité qu’il a conférée aux pouvoirs civils est caduque si les gouvernants abusent de leur pouvoir. Le mandat de représentation est donc révocable parce que le peuple a un droit de résistance. Toutefois, ce droit n’existe pas pour satisfaire les aspirations populaires, mais pour défendre l’ordre établi et à faire respecter la légalité. Le gouvernement doit donc respecter ses propres lois et rendre compte de ses actions aux citoyens (c'est à dire que les citoyens ont un droit légitime de résistance à l'arbitraire).

Le pouvoir ne doit pas être absolu. Considéré sous cet angle, Locke est l’anti-Hobbes. " Exercer un pouvoir absolu et arbitraire, gouverner sans lois établies et permanentes, voilà qui est absolument incompatible avec les fins de la société et du gouvernement ". La République exclut l’arbitraire. C’est à une autorité chargée de gouverner au moyen de lois permanentes respectant les droits naturels (notamment celui de la propriété), que doit être remis le pouvoir.

Hobbes, le théoricien du libéralisme politique

Contrairement à Hobbes, qui est un individualiste autoritaire et croit qu’il faut sacrifier la liberté pour gagner la paix, John Locke est un individualiste libéral. Il ne croit pas dans un Léviathan avec autorité absolue, mais au contraire, il vise à éliminer le despotisme, à éliminer l’arbitraire. Il ne faut pas sacrifier, il faut conserver la liberté. Locke est un précurseur du libéralisme politique et républicain (et, dans une moindre forme, économique), un précurseur des Lumières, et un théoricien politique de la révolution anglaise.

Le libéralisme veut assurer la liberté de l'homme en société. Il est lié à la démocratie, dans la mesure où les droits de sûreté personnelle, de propriété et de contracter librement assurent la liberté de l'individu face au pouvoir exécutif, lui-même soumis au pouvoir législatif du corps politique constitué de citoyens libres et égaux en droits. La justice a pour fonction de faire respecter les droits individuels contre toutes les actions inamicales d'autres individus ou contre les décisions éventuellement arbitraires de l'Etat.

Locke est le fondateur de la conception moderne du droit. Locke se tient donc à mi-chemin de Hobbes et de Rousseau. Contre le premier, il refuse que l'instinct qui pousse les hommes à quitter l'état de nature soit la peur, et que le contrat qui les lie soit celui où l'on remet tous ses pouvoirs aux mains d'un seul. Il affirme le droit à l'insurrection: si un maître offense les lois et porte atteinte aux droits naturels, il est juste de briser le contrat et de revenir à l'état de liberté naturelle. Contre ce qui sera la pensée fondamentale de Rousseau, Locke fait de l'individu et de sa volonté particulière, de son droit inaliénable à la propriété et à l'échange, le fondement de la souveraineté.

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